BÉBÉ ET MALADIE, COMMENT SURVIVRE?
ON NE VA PAS EN FAIRE UNE MALADIE!
I- CIV
Quand mon obstétricien a annoncé que bébé fœtus avait un ptit trou dans le cœur, il était très détendu. D’après lui, c’était un « symptôme » banal, fréquent et ça se refermerait tout seul. Il était fort d’avoir vu ça de manière si précoce au cours de ma grossesse, c’est le cardiologue qui me l’a dit.
Alors pourquoi est-ce que j’étais si inquiète en apprenant ça ?
Quand précisément le jour de la naissance de ma petite otarie, le cardiologue a confirmé qu’elle avait une malformation cardiaque qu’on appelle communément CIV (communication inter-ventriculaire), il était grave. Mmmm, bizarre. Mais CIV c’est banal et fréquent et ça se referme tout seul non ?
Docteur : « oui, dans le meilleur des cas. La cavité de votre fille ne fait pas partie des petits trous qui ne m’inquiètent pas. Elle est de taille moyenne. Il y a une belle probabilité pour que cela s’arrange tout seul mais d’ici là…
Je vous passe les détails médicaux.
Bref, il a ajouté que nous devrions prendre des précautions drastiques pendant le premier trimestre de la vie de notre enfant afin qu’il ne se retrouve pas aux soins intensifs sous respirateur au moindre petit virus ou microbe attrapé.
Ce docteur a été franc, vraiment très direct. Ça en était menaçant.
Il a ajouté que personne n’aurait désormais le droit d’approcher de notre fille, même pas sa sœur, ce, jusqu’à ordre contraire. Papa, maman et ça s’arrêtait là.
Les hormones en folie, sous le choc, j’ai craqué…je sortais de la douche. J’avais encore ma serviette humide en pyramide sur la tête. J’étais en chemise de nuit trop courte. Ça ne se voyait pas quand je l’ai acheté. Il faisait un peu sombre dans la cabine d’essayage et mon gros ventre de l’époque m’a joué des tours pour le choix du modèle. Ayant l’air d’une sotte, avec mon regard d’incompréhension totale, oui j’ai un peu beaucoup craqué et j’ai pleuré comme une madeleine. On aurait dit que j’avais pris une nouvelle douche froide, cette douche métaphorique était physiquement tout ce qu’il y avait de plus réel.
II- MENINGITE
L’annonce
Quand à J+6, malgré toutes nos précautions et le respect de la totalité des consignes du médecin, je pose mes lèvres sur le front de ce petit être innocent et m’aperçois que tout son corps est brûlant, nous fonçons aux urgences pédiatriques parce que le thermomètre clignote 39,1.
Et là, c’est la descente aux enfers. Le service étant plein, on nous fait passer devant tout le monde. Nous sommes pris en charge dès les premières minutes…et je ne cesse de me ronger les sangs en martelant à ma petite cervelle que ça n’est pas bon signe non ? On fait la queue aux urgences normalement, non ? Pendant des heures, non ? Sonde urinaire, piqûres à ne plus les compter parce qu’on ne trouvait pas de veine, et ponction lombaire. Le verdict arrive rapidement. Un docteur pose bébé sur son lit et me balance de but en blanc sans introduction que nous allons devoir emmener la petite à cause de sa méningite.
Euh rmrm, heuuuu, euh je n’ai pas compris, vous pouvez répéter ? ménin quoi ?
Oui méningite. Le docteur s’en va puis dix personnes entrent dans la chambre quelques secondes plus tard avec cette fois, une vraie intro et un air sombre. Madame, monsieur, asseyez-vous. Nous avons reçu les résultats de la ponction lombaire et cette dernière nous indique que votre fille a contracté une méningite bactérienne…
Ça se passe comme ça
Les voix continuent de parler et d’expliquer la marche à suivre dans les prochaines heures, les risques pour l’enfant, mon enfant, de perdre la vie ou d’avoir des séquelles neurologiques irrémédiables. Les voix parlent encore sans vraiment expliquer ce qu’est une méningite, comment nous avons pu contracter ça. Un brouhaha, un nuage, un brouillard de sons parlant et parlant encore, je ne les entends pourtant plus. Les voix s’estompent et je tombe dans les bras de mon mari. Je sens son cœur battre. Ma tête sonne et je suis envahie par les larmes. Je me noie et je n’arrive plus à garder la face devant tous ces inconnus. Je perds le contrôle. Je ne sens plus mes jambes. Je vois flou. J’ai mal, mal, mal, si mal, mon âme saigne, brûle, hurle tout dedans.
Ma fille ne pleure plus. Ne mange plus. Elle est apathique.
48h passent et je n’arrive pas à dormir. Et s’il se passait quelque chose quand je fermerai les yeux, je ne me le pardonnerais pas. Et puis pas grave, de toute manière je n’ai pas de lit dans la chambre. À peine un quelque chose métallique un brin angoissant à barreaux pour ma ptite crottinette. Quoi qu’elle passe pas mal de temps dans son engin à photothérapie aveuglée par une immense lumière violette pour soigner cette satanée jaunisse. Ah oui, j’oubliais de préciser qu’on avait la jaunisse aussi !
Je ne me change pas, ne me lave pas et ne vais pas aux toilettes non plus. Pas grave, de tout façon il n’y a pas salle de bain dans ma chambre. L’idée de m’éloigner de mon enfant rien qu’une minute m’effraie, alors, je reste. Je commence à avoir mal. Le personnel médical est dévoué et prend soin de la patiente mais on oublie un peu maman qui vient d’accoucher et qui a besoin d’hygiène corporelle. On ne me donne pas à manger non plus. Pas grave. Non, vraiment pas. L’important c’est que mon ange vive encore. On la nourrit par sonde. On lui donne mon lait que je tire scrupuleusement toutes les 3h. Et je m’interroge, ce lait est-il bon ? Suffit-t-il ? Le choc n’a-t-il pas altéré sa qualité. Et la magie agit-elle en transmettant ma peur à travers ce lait ? Oui mais dans ce cas, mon bébé doit aussi ressentir tout cet amour qui déborde…Chérie, comment puis-je l’aimer autant alors que nous nous connaissons si peu ?
Happy ending
Au terme de cette longue descente aux enfers, au terme de ces 48h, un nouveau docteur vient me voir et m’annonce le sourire aux lèvres que ma fille n’a finalement pas contracté de méningite bactérienne mais une simple méningite virale. Qu’elle vivrait et bien et qu’elle irait mieux dans quelques jours.
Je ne sais plus quoi ressentir. Mon crâne ne répond plus mais mon corps laisse entrer tout l’oxygène dont il a besoin brutalement.
III- L’APRES
3 longs mois d’isolation en suivent, de parano, de masques et de gels désinfectants, de mains lavées frénétiquement. Un trimestre interminable. Des précautions qui sont notre barrière contre les microbes et virus en tous genre. Croyez-moi il n’y en a jamais eu autant rapportés généreusement par notre grande fille de 22 mois de la crèche. Fichu hiver. Tous les petits étaient malades et souvent. Akhhh et cette première année en collectivité n’aidait pas. Notre aînée se battait, faisait son immunité. Et si elle a rapporté otite, varicelle, gastro, grippe, angine, et j’en passe, ça n’était pas sa faute choupette. C’était la fatalité. Hélas je ne pouvais me passer de cette crèche formidable qui nous a soutenu autant que possible. Car oui, je ne parvenais pas à m’occuper de mes 2 enfants à la fois…dieu que j’ai haï cette quarantaine !
Cela fusait dans toute la maison et je n’avais pas le droit à l’erreur…
IV- L’HEURE DU BILAN
Je ne jugerai pas tout ce qui s’est passé.
Ça n’est pas le but de cet article. Je souhaitais simplement coucher ces sentiments sur le papier qui m’ont hanté longtemps et qui viennent encore m’habiter de temps en temps quand je vois d’autres mamans, d’autres papas, d’autres enfants avoir mal.
J’ai eu tant de chance et mon ventre se tort encore quand j’en parle. Ma gorge se serre. Mes yeux se remplissent de nouveau de chagrin. Alors voilà, j’y tiens, je souhaite simplement vous dire, à vous, qui n’avez pas eu cette chance, à vous qui vivez des moments difficiles, qui traversez des jours, des mois, des années incompréhensibles que je pense à vous. Car la vie est si dure. Elle donne des claques dont il est difficile de se relever.
Ceci est une simple lettre d’amour pour vous.
ENGLISH VERSION
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